OMBRE ET LES BEBES DE NEIGE

par Jo Hoestlandt

 

 

La neige, en grand silence,  dansait sur la terre.
Ophélie était sortie dans le jardin blanc et désert. Elle était inquiète : son petit chat noir n’était pas rentré, hier au soir.Elle l’appela : « Ombre ? Où es-tu ? »
Elle fit quelques pas sur le chemin qu’elle ne voyait plus.Ombre avait quitté la maison sans bruit et avait disparu.
Dehors, les oiseaux se taisaient comme si leur chant était devenu secret.
Au fond du jardin, le sapin vert brillait sous les flocons qui tourbillonnaient.
– Neige neige qui vole et retombe, chuchota Ophélie, dis- moi où est Ombre, mon petit chat noir…
Elle tendait la main, et les flocons y tombaient et y tremblaient… ils s’agitaient dans sa main comme s’ils étaient vivants.
Au bout d’un moment, en les regardant de très près et très attentivement, là, dans le creux de sa main, oh ! Que vit-elle ?
Elle vit que les flocons n’étaient plus des flocons, mais de tout petits, de très minuscules enfants ! Des  bébés de neige tout blancs, qui la regardaient avec de doux yeux étincelants.
Ophélie fut si surprise qu’elle faillit les lâcher.
Sur sa paume, ceux- là étaient posés, mais tout autour d’elle, que voyait-elle ? Neige neige qui vole et retombe, il en neigeait des dizaines, peut-être des centaines, tout doucement.
Bientôt, le jardin fut couvert de minuscules enfants tout blancs, et Ophélie n’osa plus bouger d’un pied, de peur d’en écraser.

Que faisaient-ils, ces petits enfants de neige ? Eh bien ils faisaient tout ce que font les enfants quand ils sont dans un jardin : culbutes, roulades et galipettes !  Ils couraient, se cachaient, et l’un d’eux, perché sur la pointe du sapin, s’était  même fait une barbichette d’une branchette verte ! Ophélie posa par terre ceux qui étaient dans sa main, parce qu’ils la chatouillaient. Mais il en resta un, un tout petit encore plus petit que tous, un bébé de neige absolument microscopique. Il ne voulait pas la lâcher et neige neige qui vole et retombe, s’accrochait solidement à son doigt.Celui-ci, Ophélie le garda dans le creux de sa main, où il semblait se baigner, comme dans une rose baignoire d’enfant.

Neige neige, la nuit tomba, la plus belle, la plus longue des nuits d’hiver, sur le jardin tout agité des minuscules enfants blancs.
Peu à peu, Ophélie ne vit plus bien le jardin. Les flocons avaient cessé de tourner en rond,  et un petit vent glacé la fit frissonner de la tête aux pieds.Ophélie n’avait pas peur, mais elle s’était mise à trembler tout de même. Ombre, son petit chat n’était toujours pas rentré. Où s’était-il perdu ? Il faisait si froid… Elle l’appela encore, mais sa voix, trop légère, se perdait dans tout le blanc, se perdait dans le noir :
– Ombre ? Où es-tu ?

Elle aurait voulu rester dans le jardin, avec les bébés de neige, à l’attendre encore, son petit chat vagabond, mais, la nuit, la place des enfants est au chaud, dans la maison …Par la fenêtre, sa maman l’appela, plusieurs fois :
-Ophélie ! Rentre, il fait trop froid maintenant. Ne t’en fais pas pour ton chat, il reviendra demain, sûrement.
Alors, à la fin, Ophélie accepta cela : que son petit chat reste dehors, là où elle ne le savait pas. Avant de rentrer chez elle, de quitter le jardin magique et blanc où étaient tombés tous les petits bébés de neige si charmants, elle souffla sur le plus petit, celui qui n’avait pas voulu la quitter. Il vola, retomba quelque part dans le noir et dans le blanc, elle ne vit pas où.La petite fille chuchota encore :
-Neige, neige qui vole et retombe, si tu vois mon petit chat, dis- lui de rentrer bien vite, que je l’attends. N’oublie pas !

Et elle rentra dans sa maison où un bon feu crépitait joyeusement.

Le lendemain matin, quand elle s’éveilla, elle courut dans le jardin où brillait un soleil pâle. Tous les bébés de neige avaient disparu. Mais ce qu’Ophélie vit, c’est qu’avant de quitter Ophélie et son merveilleux jardin, ils avaient pleuré ! Beaucoup pleuré.  Sans doute, eux non plus, appelés rappelés par leur maman du ciel, ne voulaient –ils pas rentrer. Car ils avaient laissé derrière eux,  des centaines de larmes, toutes brillantes,  étincelantes, posées comme des perles partout, et sur le grand sapin vert, surtout.

Et c’est alors qu’Ophélie le vit arriver.
Ombre, son petit chat noir !
Il marchait vers elle, à petits pas légers, sur le chemin retrouvé.
Ombre, oui, c’était bien lui !
Mais… ça alors, quelle surprise ! Il portait  maintenant au bout de la queue, un minuscule flocon blanc qu’il n’avait jamais eu auparavant !  Comme … un tout petit bébé de neige qui se serait posé là, s’y serait accroché mystérieusement pour y passer le reste de sa vie.

 

 

 

 

 

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