Ce livre-là, publié chez Auzou, a été écrit par mon ami, Claude Carré. Je parlerai de celui-ci, parce que c’est l’un des derniers mais Claude a écrit de nombreuses histoires, a fait de nombreuses adaptations, a composé des pièces de théâtre pour la radio ( France inter et France Culture ) a écrit des modes d’emploi, des vade-mecum ( pas d’s, mot invariable ! ) de la BD, des guides, il a tout fait Claude, a vécu de sa plume à tout faire, ne refusant jamais aucun projet, et pas seulement pour des raisons financières, car il est d’une curiosité insatiable, tout l’intéresse, il se nourrit de tout ! Il aborde chaque projet avec méthode, mettant ses premiers pas dans les traces de ce qu’il connaît, et après, il s’accroche, à chaque aspérité, et il progresse, il grimpe, vers son sommet, comme il le fait en escaladant les rochers dès que le temps le lui permet. Avec conscience, mais aussi avec souplesse, avec légèreté. La gravité, c’est ça fait choir, c’est bon pour les pommes, pas pour lui, le funambule.
Oui, bon, d’accord, mais alors « Visages pâles » ça parle de quoi ?
C’est l’histoire, typique, d’un road-trip comme on dit en anglais mais moi, je préférerais le qualifier simplement de « récit de voyage ». Jane a 13 ans, son frère, Davy, quelques années de plus. Ils partent tous deux à la recherche de leur père, qui les a quittés il y a plusieurs années, n’a guère donné de nouvelles. Ils le savent aux Etats Unis, en Californie. Ils ont dix jours pour le retrouver. Ils ont besoin de lui, Davy a besoin d’une greffe, et ils espèrent que leur père pourra lui servir de donneur. ça, c’est le scénario, avec son décor, ses aventures, ses mésaventures. On ne s’y ennuie pas une seconde, les jeunes parlent comme des jeunes, les serpents comme des serpents, le tonnerre comme le tonnerre. Pas de fausse note. Et puis, c’est cinématographique, on les voit, dans leur désert, sous l’orage, on les suit dans leur voyage pourri avec rencontres de fadas garantis. Mais ce qui me touche, dans le récit de Claude, c’est surtout le voyage intérieur des personnages, le fil tendu entre eux, devant eux, parfois la toile d’araignée… Et puis, cette idée fixe : rien n’est jamais perdu, et surtout pas un père. Même faible, imparfait, même fichu le camp au bout du monde, chaque enfant en a, à un certain moment, un besoin littéralement vital et aucun désert ne l’arrêtera.
happy end, of course !