la touche Escape



Toujours, la touche  » escape » m’a fascinée.
Car c’est une tentation que j’ai toujours eu, depuis,  » la plus tendre enfance » comme on dit de toutes les enfances, même de celles qui n’ont pas été très tendres.
La mienne, si, plutôt. Je me sentais aimée. pas toujours à la hauteur de mes espérances, mais enfin, globalement, je ne pouvais décemment pas me plaindre. D’ailleurs les plaintes, à l’époque, nous étaient rigoureusement interdites ; au motif que, génération du baby boom, on n’avait pas connu la guerre et qu’on n’avait donc et pour la vie, aucun motif de se sentir d’une autre humeur que reconnaissante et heureuse. Je constate d’ailleurs avec fatalisme que cette étiquette d’heureux enfants du babyboom nous suivra jusqu’à la mort, sans qu’on se demande jamais si cette injonction même au bonheur forcé ne fut pas, à certains, très pesante, ne poussa pas la plupart, ad vitam aeternam, à faire semblant de l’être pour ne pas décevoir…
Car malgré tout, du plus loin que je me souvienne, moi, en tout cas, je vivais dans une grande inquiétude, convaincue de percevoir précipices et abîmes, gouffres et volcans, blessures, là où les autres ne distinguaient rien, ou seulement une petite fente dans la terre ou le bitume, une taupinière, une vague éraflure, un trait dans le ciel laissé par un avion qui passe.
L’arbre ne me cachait ni la forêt ni le loup qui s’y trouvait, si l’avion traçait une ligne, qui allait écrire quelque chose dessus, et quoi? Et le nuage était visiblement un morceau d’ouate pour cacher une entaille du ciel d’où pouvait dégringoler n’importe quoi, de nuit comme de jour, car qui savait ce que le bleu et la nuit dissimulaient au fond
Pas une seule journée, je crois, où je n’ai eu l’impression que marcher au bord du trottoir me condamnait à côtoyer la mort au moindre faux pas. Et voir les autres jouer, joyeusement, au bord des gouffres, comme si de rien n’était, loin de me rassurer, m’angoissait terriblement. Car, soit ils l’ignoraient – mais comment faisaient-ils alors que cela crevait les yeux – soit ils le savaient aussi bien que moi, mais s’en fichaient royalement, ou même, mille fois plus courageux que moi, s’en amusaient.
Le fait était – est toujours- que la plupart du temps, et à mon grand désarroi, il ne se passait rien de plus grave pour eux que pour moi. C’est ainsi que je crus longtemps que cela ne pouvait être que la preuve de Dieu, ou du moins, de l’efficacité de ses sentinelles et gardes des corps, les protecteurs anges gardiens.
Mais, je pensais aussi, que, puisqu’Ils étaient au courant de tout, Ils savaient bien que, les gouffres, les précipices, tous les malheurs qui pouvaient à chaque instant nous tomber dessus, moi, je les voyais. Et je les soupçonnais donc de faire bien moins attention à moi qu’aux autres, puisque je faisais déjà gaffe toute seule. Or, évidemment, je doutais d’être toujours capable d’éviter le pire, à moi et à ceux qui m’entouraient…
De l’avis général, du coup, j’étais une grave emmerdeuse ! Mère – poule bien avant l’âge d’être mère ou poule.
D’où, bien souvent, la tentation très vive de m’enfuir, de me carapater, m’escapater, laisser là le monde en plan, les autres se démerder sans moi puisque c’était comme ça.
Je l’ai fait, parfois. Pour revenir très vite, comme un chien « la queue basse » et le regard triste et honteux qui demande pardon pour ce qu’il a fait ou ce qu’il n’a pas fait.
Mais surtout, qu’est-ce que j’en ai rêvé ! De m’en aller vivre, un jour, incognito ( le mot me ravissait) au bord d’une large plaine d’où l’on peut voir très loin ce qui vient, ou ne vient pas, sur terre comme au ciel, gens, bêtes, machines, nuages, pluies, tornades, orages et neiges, anges et démons…
Maman s’étonnait que j’aime l’immense plaine de la Beauce où vivaient mes arrière-grands-parents, – c’est tellement plat, morne, moche il ne s’y passe jamais rien- Oh oui ! Justement ! Comme c’était rassurant !
Pas plus haute que les blés dans lesquels « incognito » je marchais à l’abri, je voyais le monde jusqu’à l’horizon, sans être vue. Apaisée.

La touche « escape » est toujours là, agaçante, fausse, mensongère.
Je l’ai essayée, parfois, lors de quelques combats inégaux entre l’ordinateur et moi. ça marche pas, ou c’est moi qui l’ai pétée, je ne sais pas.
Je regarde mon écran avec sans doute le même accablement, le même regard de chien battu que je prenais devant mes parents, et les autres, qui ne comprenaient pas.
Mais la vérité est sans doute qu’il n’y a probablement jamais eu, nulle part, d’échappatoire.
Et que cette fois, tout le monde le voit, comme moi, et en même temps que moi : les gouffres, les précipices, l’arbre qui cachait la forêt, la forêt qui recouvrait le volcan, le nuage qui dissimulait le trou dans le ciel… Tout.
Tous alors tapotent la touche escape, avec de moins en moins de conviction au fil du temps…
Et en désespoir de cause, avançant masqués, dans une dérisoire tentative que la mort ne reconnaissant personne, passe son chemin… Retourne d’où elle vient : ailleurs.

Au moins, je devrais me sentir plutôt contente de ne plus être seule face à tout cela que j’ai mille fois affronté, déjà…
Et bah même pas.
Dans le fond, je préférais encore quand ils ne voyaient rien. Que je pouvais leur donner la main pour les aider à sauter par dessus le gouffre, les prendre dans mes bras pour les sauver de ce qui tomberait du ciel même si on ne le voyait pas venir.
Mère-poule, je vous dis.
Et emmerdeuse, jusqu’au bout.

PRÊTS POUR LA FÊTE

C’est là le titre du deuxième volume des  » Neuf de la rue Barbe », sorti début septembre, comme annoncé.
Notre joyeuse bande d’enfants prépare la fête de la rue, moment que chacun voit à sa façon, mais que tous adorent.
Les filles ont envie de monter un chouette chorégraphie, AVEC les garçons qui traînent un peu les pieds, et rêvent plutôt d’animations…plus pétaradantes.
Au bout du compte ( du conte ?) et malgré les diverses surprises bonnes ou moins bonnes, la journée rester mémorable !

Nous nous sommes bien amusées, Irène Bonacina et moi, avec ce second volume de notre série. Les enfants prennent du caractère, sont à la fois uniques et solidaires, bref, nous, on les aime de tout coeur et on espère que vous partagerez notre plaisir.

Le troisième tome est déjà écrit, il s’intitule, pour le moment  » Le jeu des 9 familles » l’occasion pour chacun de parler aux autres de sa famille, des secrets, des états d’âme, des découvertes…
Il sortira mi – mai, et Irène s’y attelle dès à présent !

Le quatrième tome est déjà écrit aussi, et sera pour Noël 2021 ! Comme quoi, on voit loin !



Je serai demain samedi 10 octobre à la librairie Doucet du mans en lice pour le prix Dimoitou. Le livre concerné est celui des 9 de la

Rue barbe !

Pour les détails, vous trouverez sûrement tout sur leur site !

J’en profite pour signaler que le second volume de la série est sorti tout beau tout frais il vous attend sur les étagères des librairies ! Augmenté d’un bandeau rouge compliment de Télérama !

A bientôt donc