Nous allons d’année en année comme d’ile en île,
et souvent d’un petit bond facile
nous en franchissons l’espace d’un battement de cil.
Presque rien à quitter
presque rien à sauver
soleil et lune pareillement alignés
Le même éclat des deux côtés.
Nous allons d’année en année comme de rue en rue,
aveugles emportés dans le flot ininterrompu,
passants si serrés que notre ombre a disparu.
Presque les yeux fermés
presque sans rien chercher
chacun traînant laborieusement sur le pavé
son filet plein de promesses abandonnées.
Nous allons d’année en année comme de page en page,
ignorant parfois quelques lignes, distraits, volages,
tandis que pluies et neiges tombent sur les visages,
presqu’à les effacer…
Et si pour changer, nous ne changions pas d’année cette année ?
Mais nos yeux pour la regarder, notre bouche pour l’embrasser ?
Et si nous laissions nos pieds libres de nous égarer ?
Presque sans peur…
Presque sang et larme mais bonheur…
Du temps qui passe ne gardons que la couleur…
Et mesurons les années aux seuls battements du cœur.